Cher bon vieux Charlie Hebdo
Tonton de plume
Frère de sang
Figure-toi qu'avant
Apollo 12...
j'instruisais contre toi.
Sévèrement.
Depuis juillet 2016,
des sept ou huit fois
où tu mentionnas
l'attentat de Nice,
– sur quelque support que ce soit –
la plus longue,
à ce point de mes recherches
était
ici à peine résumée :
Juliette Méadel déclare que Nice
est le premier attentat ayant visé des enfants.
Ah bon ? Et Toulouse, ce n’est pas en France ?
ET TOC !
HA HA HA !
Sacré vieux Charlie !
Ton verbe toujours si cinglant
à l’égard des bourges et des fachos.
La Côte d'Azur en foisonne.
– Enfants et parents d'Ozar Hatorah
sur vous le salut et la paix.
Tu ne comptais pas, je pense,
nous dédier
une batterie de coffrets
de chroniques au trait virtuose.
C'était dur.
D'autant plus dur,
que,
sache-le,
vidant la chambre
de ma défunte señorita
j'ai retrouvé
roulé en tube
au fond du placard
derrière ses sweats et son odeur
le panneau Je suis Charlie
dessiné avec ses copines
au feutre et à la peinture.
Sûr que furieux,
je l'étais.
Pour te dire,
j'allais même te demander
combien de zéros
à tes chèques d'indemnisation,
juste pour comparer.
Tu vois un peu
l'état de colère.
Il me restait à dénicher
ton numéro 1252
20 juillet 2016
pour décider de publier
ou non
cette chronique.
Elle ne t'aurait certes
pas fait grand mal :
dans l'audimat,
je ne suis pas Charlie
– quand bien même
évidemment,
Je suis Charlie.
Et puis il y eut
APOLLO 12.
Pardon Charlie
L'article qu'il nous fallait.
Celui qui nous manquait.
Celui qui fait du bien,
qui dit ce qu'il fallait dire.
L'article que tout le monde déteste
sauf les victimes du 14 juillet 2016.
Numéro 1573
14 septembre 2022
Signé Robert McLiam Wilson
Traduit par Myriam Anderson.
APOLLO 12.
M'est-il permis d'en citer des extraits ?
Qui peut nommer les trois astronautes d'Apollo 12 ?
L'attentat de Nice a été horrible en tous points.
mais il a aussi été, et sans appel, Apollo 12.
L'accès à l'Île de la Cité n'a pas été interdit
d'où les Américains en short.
Dans la belle salle Diderot,
au début nous étions quatorze,
à la fin de l'après-midi
nous n'étions plus que six.
Millions de personnes dans la rue pour Charlie
Dépression nationale après le 13 novembre.
"Celui de Nice, vous savez ? Le feu d'artifice le camion les enfants...
– Non-je-ne-me-souviens-pas-de-celui-là".
On s'en fiche de l'attentat de Nice,
on n'a plus le temps.
On a donné toute notre énergie
pour ce qui s'était passé avant.
Toi non plus, vieux Charlie
tu n'as plus le temps
mais depuis la salle de presse
si vide
tu es le premier à le dire
à le voir peut-être
et mon cœur te remercie.
Allo Houston – Allo Houston
Ici Apollo 12
On a un gros problème
mais Papa Charlie nous a vus
et c'est déjà ça.
Sans rancune,
ami Charlie.
Carquois de cure-dents
sur le dos
reprendre le chemin
de la chasse au mammouth.
Oh ! là ! RTL !
Et le mec de Quotidien !
Une fois n'est pas coutume :
Votre livre « 19 tonnes » m’accompagne, tous les jours j’y plonge. A me noyer, j’en suffoque.
cet attentat c’est effroyable sidérant terrifiant impossible insensé tellement définitif.
comment survit-on à la perte de son enfant en pareilles circonstances ..alors jour après jour je vous lis, et je ne peux qu‘effleurer votre douleur, ce trou béant.
je vous souhaite d’être heureux.